Extrait




Hosties noires, “Camp 1940”, à Abdoulaye Ly
 
“Saccagé le jardin des fiançailles en un soir soudain de tornade
Fauchés les lilas blancs, fané le parfum des muguets
Parties les fiancées pour les Isles de brise et pour les Rivières du Sud.
Un cri de désastre a traversé de part en part le pays frais des vins et des chansons
Comme un glaive de foudre dans son coeur, du Levant au Ponant.
 
C’est un vaste village de boue et de branchages, un village crucifié par deux fosses de pestilences.
Haines et faims y fermentent dans la torpeur d’un été mortel.
C’est un grand village qu’encercle l’immobile hargne des barbelés
Un grand village sous la tyrannie de quatre mitrailleuses ombrageuses.
Et les nobles guerriers mendient des bouts de cigarette
Ils disputent les os aux chiens, ils se disputent chiens et chats de songe.
Mais seuls Ils ont gardé la candeur de leur rire, et seuls la liberté de leur âme de feu.
Et le soir tombe, sanglot de sang qui libère la nuit.”