Extrait

La fille du roi Baudouin, page 178-179

"La visite de la reine Fabiola alimenta longtemps les conversations des lycéennes. On regrettait qu'elle ait été si courte et que le beau programme qu'on avait si longuement et si soigneusement préparé n'ait pu se dérouler comme prévu: les choristes et les danseuses étaient les plus amères. Pourquoi la reine était-elle si pressée? Cela avait paru bien choquant de la part d'une reine. Est-ce qu'on marche si vite quand on est une reine? Ou même quand on est une femme qui se respecte ? On reconnaissait bien là les mauvaises manières des Blancs. Veronica donna l'exemple des bamikazi d'autrefois: elles, elles savaient se déplacer avec une digne lenteur, comme si elles comptaient chacun de leurs pas, l'idée ne serait venue à personne de leur dire de se dépêcher comme paraissait le faire l'homme à la montre: le temps, c'étaient elles qui en décidaient. Gloriosa répliqua aussitôt que ces reines étaient des Tutsi, donc des paresseuses qui n'avaient jamais touché une houe, des parasites que les corvées du pauvre peuple devaient nourrir. Et que ce n'étaient pas là de bonnes manières pour les vraies Rwandaises."