Yahia Belaskri. Un amour de mec.

{ 28-07-2014 - Algérie }

Source : CEC

 

Une série d’ « AUTOPORTRAITS EN MIROIR » où les écrivains vous proposent de partager leurs complicités littéraires, leurs amitiés, ou tout simplement une envie de faire découvrir un livre, une oeuvre, une personnalité littéraire.

Déjà parus:

« Ananda Devi ou le charme cruel », par Sami Tchak

« James Noël, l’Intranquille », par Ananda Devi

 

Un amour de mec

Par James Noël

D’abord, j’ai rencontré un nom : Yahia Belaskri. Le genre de nom que l’on aimerait avoir pour sortir d’emblée de l’ombre et du silence. Un vrai nom d’auteur qui se termine par un cri : Belaskri ! Mais, ici-bas les choses ne sont pas si simples — et Yahia l’a bien compris —, c’est à la force du poignet et à la sueur de son encre qu’il est entré en littérature. Puis, son nom s’est arrangé pour suivre son corps flottant dans des beaux costumes qu’il porte dans les voyages et même chez lui, rue Alésia, Paris 15 ème. Il y a lieu de s’interroger sur les costumes ou le clavier de l’auteur. Entre les deux, lequel fait de lui cet artiste à plein temps?

Il est malin notre Yahia, pour venir au monde avec un nom taillé sur mesure depuis la « blessure ombilicale », l’Algérie, grand amour contrarié qu’il porte les veines ouvertes sur le papier.

Ensuite, j’ai rencontré l’homme pour la première fois au salon du livre de Montreuil, devant le stand des Éditions Vents d’Ailleurs. Dès la première rencontre, j’aurais pu jurer « Ô Bahia de tous les Saints, ce monsieur qui marche avec le cœur sur la main ne peut être qu’un honnête homme ! Cette première impression s’est révélée, on ne peut plus “juste”. Tiens, Yahia me fait souvent penser à son compatriote Albert Camus, ils ont l’Algérie en face, mais de profil y a quelque chose qui les rapproche de près, de loin. Une ressemblance, en anamorphose, presque.

Dans ce monde de vipères, de distorsion et de contorsion qu’est l’espace littéraire, Yahia est un oxygène qui fait respirer par cœur les amitiés. Non seulement, il entretient des liens de manière solide et solidaire avec ses amis, mais il s’assure que tout se passe bien entre les autres. Qu’avons-nous ri à Port-Salut, entre rhum saur, fortifié par la voix de Nina Simone, lors de sa résidence à Passagers Des vents ? Nous étions tous fascinés, Julien, Franscesco, Pascale et moi devant cet homme qui se rase la barbe, s’habille dès le réveil, comme pour un rendez-vous ferme avec les mots. J’ai cru comprendre à cet instant ce que c’est qu’un « vrai tempérament d’écrivain.»

S’habiller pour écrire/Écrire pour s’habiller. Merci Yahia pour ce cœur disponible et pour cette leçon de vie, loin des effets de mode et de tout nombrilisme. Maintenant, il me paraît plus qu’évident, les lecteurs et les lectrices ne lisent que dans l’espoir de sortir… avec un auteur.

“Si tu cherches Yahia, il vient d’en haut”, écrivait une journaliste qui voulait sans doute s’amuser avec le titre (1) de son 2ème roman pour lequel l’auteur avait obtenu le prix Ouest-France Etonnants voyageurs, mais croyait-elle si bien dire ? Yahia vient des plus hautes sphères. Sacré Yahia, grand Belaskri ! Un homme ouvert et généreux, un amour de mec. James Noël

(1) « Si tu cherches la pluie, elle vient d’en haut », Yahia Belaskri, Vents d’Ailleurs 2010.